La prolongation du délai contractuel pour cause d’intempéries

Temps de lecture : environ 6min

Vous avez sûrement connu ce chantier maudit en terme de pluie, de gel ou de vent, qui a subi de multiples arrêts de chantier liés aux conditions climatiques…

Heureusement, les marchés de travaux prévoient ces arrêts de chantier et l’entreprise ne peut pas être sanctionnée pour un éventuel retard lié aux intempéries.

Mais, pour faire valoir ces droits, vous devez connaître les conditions d’applications des prolongations de délai. C’est ce que nous allons voir dans cet article !

 
Chantier recouvert de neige
 

Définition d’une journée d’intempérie

Il convient de distinguer deux conséquences des intempéries sur un chantier :

  • Le chômage intempérie, qui réglemente les conditions dans lesquelles l’entreprise peut ou doit interrompre le travail et indemniser les travailleurs.

  • Les arrêts de chantier pour intempéries qui donnent droit contractuellement à une prolongation du délai.

 

Le chômage intempérie

Le « chômage intempérie » est régi par le code du travail (article 5424-6 à 19).

L’arrêt des travaux pour intempéries est décidé par l’employeur ou son représentant sur chantier, après consultation des délégués du personnel.

Il est prononcé lorsque les conditions atmosphériques ou les inondations rendent dangereux ou impossible l’accomplissement du travail eu égard soit à la santé ou à la sécurité des salariés, soit à la nature ou à la technique du travail à accomplir.

Le texte prévoit dans ce cas l’indemnisation des travailleurs par l’employeur. (Plus de précisions sur le site de l’URSSAF)

L’employeur peut ensuite être indemnisé par la caisse de congés intempérie BTP si les critères sont réunis.

 
Pluie qui rejaillit sur un plateau d'échafaudage
 

Quelques statistiques

Sur l’année 2020, le nombre d’arrêts de travail enregistré par la caisse de congés intempéries BTP est de 222.646 et représente environ 6,5 millions d’heures indemnisées.

Il s’agit du plus faible nombre d’heures indemnisées sur une année depuis la création de la caisse en 1946, le record étant pour l’année 1962, 165 millions d’heures indemnisées.

Quatre types de risques climatiques sont reconnus par la caisse comme susceptible de déclencher un arrêt de travail :

  • La pluie (90 % des arrêts de travail),

  • Le gel (y compris le verglas et la neige) (4 % des arrêts),

  • L’inondation (3 % des arrêts),

  • La tempête (3 % des arrêts).

Le rapport complet des caisses CIBTP est disponible en cliquant ici.

 

Les prolongations de délais pour intempéries

Les arrêts de chantier dûs aux intempéries donnent droit à une prolongation du délai contractuel si l’on s’en tient au CCAG Travaux pour les marchés publics et à la NFP03 001 pour les marchés privés.

Cependant, il convient de porter une attention aux clauses présentes dans les documents particuliers du marché (CCAP), qui définissent très précisément les prolongations de délai auxquelles l’entreprise peut prétendre.

 

Intempéries en marché public

C’est l’article 19.2.3 du Cahier des clauses administratives générales qui s’applique aux marchés publics de travaux.

Celui-prévoit :

« Dans le cas d'intempéries au sens des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, entraînant un arrêt de travail sur les chantiers, les délais d'exécution des travaux sont prolongés.

Cette prolongation est notifiée au titulaire par un ordre de service qui en précise la durée. Cette durée est égale au nombre de journées réellement constaté au cours desquelles le travail a été arrêté du fait des intempéries conformément auxdites dispositions, en défalquant, s'il y a lieu, le nombre de journées d'intempéries prévisibles indiqué dans les documents particuliers du marché.

Les samedis, dimanches et jours fériés ou chômés compris dans la période d'intempéries sont ajoutés pour le calcul de la prolongation du délai d'exécution.

Dans le cas d'intempéries non visées par une disposition légale ou réglementaire ainsi que dans le cas d'autres phénomènes naturels entravant l'exécution des travaux, si les documents particuliers du marché prévoient la prolongation du délai d'exécution en fonction de critères qu'il définit, cette prolongation de délai est notifiée au titulaire en récapitulant les constatations faites. »

On veillera donc à signaler immédiatement par écrit au maître d’oeuvre et au maître d’ouvrage tous les faits provoquant des arrêts de chantier.

Le CCAG Travaux ne donne pas de définition de la notion d’intempéries mais renvoie aux « dispositions législatives ou réglementaires en vigueur ».

Ces dispositions sont celles définies par le Code du travail et décrites plus haut dans l’article (article 5424-6 à 19 du Code du Travail).

Lorsque les conditions sont réunies, les arrêts de chantier pour intempéries couverts par le Code du travail, entraînent une prolongation du délai d’exécution en application du CCAG.

Attention cependant au CCAP qui peut intégrer des définitions propres au marché, qui caractérisent les phénomènes de manière plus précise. Le conducteur de travaux doit vérifier attentivement ces clauses.

L’entreprise est donc autorisée à arrêter les travaux en cas d’intempéries, soit au sens des dispositions légales, soit au sens des dispositions particulières du marché, sans qu’elle puisse être pénalisée pour le dépassement du délai d’exécution qui en résulte.

 

Déclaration des jours d’intempéries

L’idéal pour établir vos déclarations de journées d’intempéries est de se fonder sur un relevé Météo France, d’ailleurs, certains marchés de travaux précisent la station météo qui servira de référence pour la prise en compte des intempéries.

Au cas où le marché ne précise rien et que vous n’avez pas accès aux relevés payants de Météo France, je vous conseille d’utiliser le site de l’association Infoclimat.

Sur ce site, vous pouvez sélectionner une station météo proche de votre chantier, et remonter l’historique pour consulter les mesures enregistrées aux jours qui vous intéressent (l’historique varie en fonction de la station sélectionnée).

 

💡 Pour signaler vos arrêts de chantier liés aux intempéries, vous pouvez télécharger en bas de cet article un modèle de fiche de déclaration des intempéries ainsi qu’un modèle de tableau pour en assurer le suivi.

 

Formalisation de la prolongation de délai

Les modalités particulières du marché présentent potentiellement plusieurs cas pour la prise en compte des intempéries dans le délai :

  1. C’est au maître d’œuvre de définir, en fonction des conditions météorologiques, les journées qui doivent être considérées comme intempéries.
    Dans ce cas, le conducteur de travaux portera une attention toute particulière à faire remonter les arrêts de chantier, à étayer ces dires par des faits lors des réunions de chantier.
    Il veillera à vérifier la bonne tenue du décompte des journées d’intempéries dans le compte rendu de chantier.

  2. Un nombre de journées d’intempéries réputées prévisibles peut-être prévu au marché.
    Dans ce cas, le délai contractuel ne sera prolongé qu’après dépassement du nombre de jours d’arrêts pour intempéries prévu au marché.

  3. Une valeur limite à dépasser peut être décrite précisément (mm de pluie sur une période donnée, km/h de vent, température minimale pendant une certaine durée…).
    Dans ce dernier cas, les journées ne seront décomptées qu’à la fourniture d’un relevé de station météorologique indiquée dans le CCAP ou la plus proche du chantier.
    Les données ne seront probablement pas conformes à la réalité sur site, mais étant contractuellement très précises, les jours comptés en intempéries ne seront pas discutables.

 

Dans tous les cas, l’arrêt de travail est en principe décidé par l’entrepreneur qui en informe le maître d’œuvre.

Le cas échéant, la prolongation qui en résulte sera acceptée, constatée et notifiée à l’entrepreneur par un ordre de service de la maîtrise d’œuvre qui précisera la durée de la prolongation.

Il convient de mentionner lors des informations faites au maître d’œuvre, si la base du décompte des intempéries est tenue en jour ouvrable ou calendaire, ainsi que le calcul de la prolongation du délai.

Lors du décompte, garder à l’esprit que conformément au CCAG Travaux, « les samedis, dimanches et jours fériés ou chômés compris dans la période d’intempéries sont ajoutés pour le calcul de la prolongation du délai d’exécution. »

 
Gouttes de pluie sur des barres d'acier haute adhérence (HA)
 

Intempéries en marchés privés

En matière de marché privé, les journées d’intempéries sont considérées comme des causes extérieures aux parties pouvant justifier un arrêt de chantier, conformément à l’article L.5424-6 du Code du travail.

La prolongation du délai d’exécution des travaux en résultant ne peut pas être reprochée à l’entreprise.

Par ailleurs, la NF P 03-001, cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés privés de travaux qui y font référence, encadre explicitement le cas des journées d’intempéries.

L’article 10.3.1.1 de cette norme indique tout simplement :

« Le délai est prolongé de la durée des journées d'intempéries. »

L’article 10.3.1.2 précise les journées qui doivent être considérées comme journées d’intempéries :

  • Les jours pendant lesquels le travail a été arrêté, conformément aux dispositions du Code du travail.

  • Les jours pour lesquels une impossibilité technique à poursuivre les travaux a été validée par le maître d’œuvre.

Pensez à vérifier que votre dossier marché fait bien référence à la norme NF P 03-001, avant de vous appuyer sur cette définition pour justifier un arrêt de chantier et une prolongation de délai.

 

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  • Modèle de fiche de déclaration des intempéries (Word)

  • Modèle de tableau de suivi des jours d’intempéries (Excel)

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